Cet article est (très) librement adapté inspiré de l’article de Cracked : 8 Things Some A$$#ole Says in Every Debate About Sexism.
J’ai féminisé/masculinisé volontairement les rôles, par pure provocation gratuite, car je suis un instrument du démon.
#8 Le « Duh-DoS »
La technique est simple. Demander systématiquement des preuves, et s’indigner si on répond que le sexisme est tellement présent qu’il est inutile d’en donner…
NON, l’égalité au niveau professionnel existe, il n’y a pas de sexisme au travail, prouve-le moi immédiatement !
NON, les hommes sont plus souvent victimes de violences, prouve-moi le contraire !
Et l’interlocutrice de chercher sources, références statistiques (c’est bien pratique). Chiffres aussitôt balayés d’un revers de main en affirmant que « De toutes façons, les chiffres on leur fait dire ce qu’on veut ! ».
L’interlocutrice en question ne souhaite pas répondre en invoquant le renversement de la charge de la preuve (et elle a bien raison) ? Elle ne veut pas répondre car elle sait qu’elle se trompe, cette succube venue de l’enfer !
Dans le monde de l’informatique, ce type d’attaque est appelé « DDoS » (Distributed Denial of Service). Pour faire simple, on inonde un serveur de requêtes simples afin que celui-ci soit tellement occupé qu’il ne puisse plus rien faire. C’est typiquement ce qui se passera donc : la discussion va s’embourber indéfiniment.
Bonus : Le Duh-DoS occupe alors une fausse position d’autorité. Et oui, lorsqu’on vous accuse de mentir, votre premier réflexe sera de vouloir prouver votre innocence. À partir de là, vous êtes ferrée.
Parade : Lui rappeler que c’est à celui qui affirme que revient la charge de la preuve. Ce n’est pas à vous de faire le Google bot à sa place. Il persiste ? Ignorez-le. Dans tous les cas, quoi que vous puissiez dire, quels que soient les faits, ce n’est qu’un jeu pour lui, il n’a aucun intérêt à vous écouter, vous n’avez aucun intérêt à lui répondre.
#7 Le « Semantic Quo »
Outre ses goûts vestimentaires plus que douteux, le Diable se cache dans les détails. Le Combattant de la Sémantique aussi. Vous pensiez avoir esquivé le « Duh-DoS », vous vous retrouvez maintenant en proie à ce spécimen encore plus vicieux. Le Combattant de la Sémantique vous reprendra sur UN point. UN mot. UN accord. Après tout, votre argumentation l’intéresse beaucoup moins que le respect de la grammaire le maintien et la pérennité de ses privilèges de mâle. Et comme il n’a, lui, aucune idée de la manière de répondre avec des phrases construites, il va vous demander dans quel sens vous utilisez tel mot, telle structure grammaticale afin de « prouver » qu’en réalité vous êtes un suppôt de la misandrie.
Je vois que tu utilises le mot « genre » dans ta phrase. Permets-moi de te demander de bien vouloir préciser si tu entends ce mot dans le sens philosophique, social ou biologique ? En effet, la distinction est de taille, n’est-ce pas. La moindre des choses serait d’être plus précise à l’avenir quant au choix de tes mots. Hinhinhin.
Bonus : Vous relisez 3 fois chacun de ses commentaires, 8 fois chacune de vos réponses qui est de plus en plus longue, vous commencez à transpirer.
Parade : Idem que ci-dessus. Si le Combattant de la Sémantique ne parvient pas à comprendre ce que vous écrivez, ignorez-le. Ne perdez pas de temps, vous savez bien qu’il fait exprès !
#6 « Sois une sainte ou va te faire foutre »
On pourrait appeler ce spécimen le « Spéléologue des Débats ».
En 1999, vous avez dit sur votre Skyblog que vous trouviez votre camarade de classe vulgaire avec son rouge à lèvres violet ? BIM ! L’internet est incorruptible, l’Internet se souvient de tout, et surtout de vous lorsque vous aviez 13 ans et un modem 56k.
Pour le Spéléologue des Débats, c’est simple : chacun-e est immuable. Personne ne change d’avis (surtout pas lui *ahem*), l’erreur est mortelle.
Donc soit vous êtes une sainte, c’est à dire que vous n’avez jamais JAMAIS tenu de propos problématique de toute votre vie virtuelle ou que vous avez eu la présence d’esprit d’utiliser un pseudonyme ou d’effacer vos traces, soit vous ne méritez pas de vous prétendre féministe. Voilà. Non, pas de juste milieu, et puis c’est pas vous qui décidez, chut.
Aucune citation problématique ne peut être trouvée ? Pas de problème, le Spéléologue des Débats est biclassé en « sortir une phrase de son contexte ».
Bonus : Permet d’embrayer sur du slut-shaming, du victim-blaming et toute forme de cassage de briques sur le dos de n’importe quelle victime ou personne dominée.
Parade : Vous avez appris de vos erreurs. Pas lui. Soyez prise de pitié une demi-seconde, puis bashez-le de toutes vos forces. Voilà.
#5 Accuser les victimes de mentir
Pas besoin de pratiquer la spéléologie pour devenir un parfait tocard, même si ça aide. Autant ne pas pousser le raisonnement et rester au niveau zéro de la réflexion. Nier l’évidence, ne pas croire les victimes ou les accuser à leur tour, ne pas regarder les preuves, et voilà !
Le déni offre un confort incomparable.
Et puis si on réfléchit un tout petit peu, toutes ces accusations, bon, au bout d’un moment ça sent le complot, non ? Regarde, d’un coup tout le monde se prétend victime de harcèlement de rue, c’est pas un peu curieux ?
Un complot de femmes pour asservir les hommes, voilà. Absolument pas un appel d’air provoqué par la libération de la parole des victimes, c’est trop compliqué. Alors qu’une bonne théorie du complot, ça, ça nourrit son homme !
Une femme a un jour dans le monde émis une fausse accusation de viol ? Hardi-petit ! La voilà, la preuve que toutes les femmes mentent ! Un seul homme en prison victime de fausses accusations c’est beaucoup plus grave que des femmes violées n’obtenant jamais justice !
Bonus : La violence des propos dégoûtera la plupart des victimes présentes. Certaines réagiront de manière épidermique, ce qui permettra de les traiter d’hystériques, les autres se tairont.
Parade : Cette personne n’a rien à faire sur un débat concernant le sexisme. Ni sur Terre. Ni ailleurs. Liguez-vous contre lui, et s’il vous accuse de le priver de sa liberté d’expression, répondez-lui qu’il « l’a bien mérité ». Puis sortez vos mugs à male tears.
#4 L’Outré
Et voilà, une des personnes suivant la conversation a (bizarrement) mal pris certains propos et réagit mal. C’est non seulement très très curieux et étonnant, car bon, on lui a juste dit que son vécu de victime c’était de la merde en barre, mais en plus ça agresse les tympans virtuels d’un homme. Et ça, c’est insoutenable. Bien plus que sa prétendue expérience de victime.
Vous seriez moins agressives, franchement, peut-être qu’on vous écouterait plus.
Il est vrai que le bien-être de l’interlocuteur mâle blanc cishet présent sur la conversation devrait primer sur tout le reste. Restons courtoises, mesdames !
Lorsqu’on vous dit par exemple : « Je ne nie pas ton expérience, hein, MAIS bon, quand même, je pense que tu exagères un peu », ne menacez pas de sortir le sécateur, malheureuse ! Ce brave homme cherche simplement à vous faire entendre raison. Après tout, il y a beaucoup d’autres problèmes dans le monde que le vôtre, même si vous êtes censés débattre de ce sujet précis !
Et puis « vous desservez votre cause », lorsque le Mâle trouve que vous parlez pour rien, c’est qu’il faut vous taire, petite gourgandine.
On demande des droits, d’accord, peut-être, éventuellement qu’On nous écoutera, mais pour ça, gamine, faut demander gentiment à papa. Allez, je sais que tu en es capable.
Plus sérieusement. Comme disait Christiane Rochefort :
Il y a un moment où il faut sortir les couteaux.
C’est juste un fait. Purement technique.
Il est hors de question que l’oppresseur aille comprendre de lui-même qu’il opprime, puisque ça ne le fait pas souffrir : mettez-vous à sa place.
Ce n’est pas son chemin.
Le lui expliquer est sans utilité.
L’oppresseur n’entend pas ce que dit son opprimé comme un langage mais comme un bruit. C’est dans la définition de l’oppression.
En particulier les « plaintes » de l’opprimé sont sans effet, car naturelles. Pour l’oppresseur il n’y a pas d’oppression, forcément, mais un fait de nature.
Bonus : Capacité d’énervement exponentielle. Je ne sais pas pour vous, mais moi quand on me dit d’une voix doucereuse de me calmer, je hurle encore plus fort.
Parade : Le pousser lui aussi à l’énervement en lui disant par exemple des trucs pas cool sur la testostérone ou les testicules, puis lui demander de se calmer. C’est pas bon pour le cœur.
#3 « Feminazi »
La technique utilisée ici est celle de l’épouvantail. Fastoche.
La reconnaissance du féminicide dans la loi permettra aux féministes de faire enfermer n’importe qui sous de fausses accusations !
Les anti-abolitionnistes veulent que des gamines de 14 ans se prostituent !
L’adoption d’enfants par les couples homosexuels est la porte ouverte à la pédophilie !
Vous avez reconnu certains arguments de la LMPT ? C’est normal. La fameuse « djeundeur theory » et les élucubrations sur l’apprentissage de la masturbation à l’école sont de bons exemples de cette technique. Prenez un bout de phrase au hasard, tripatouillez, rendez-le méconnaissable, et hop !
L’utilisation du terme « feminazi » en est une bonne illustration :
- Les féministes veulent l’égalité femmes/hommes et donc que tous aient les mêmes privilèges.
- Si tout le monde a les mêmes privilèges que moi, je ne suis plus privilégié !
- Si les hommes ne sont plus privilégiés, ils seront en position de faiblesse.
- Si les hommes sont en position de faiblesse, les femmes feront tout ce qu’elles veulent.
- …et vont donc conquérir le monde par la force et construire des camps de concentration misandres.
- Donc le but des femmes est de conquérir le monde par la force blabla misandrie.
Bonus : Le mot « feminazi » est le Point Godwin de la discussion. Littéralement.
Parade :
[…]there’s a useful quick check to find out if someone’s an asshole, and it works on both sides: Ask them how they feel about transgender people. That’ll identify who truly cares about equality and who’s just being an asshole real quick.
Il existe un moyen très simple de savoir si quelqu’un est un tocard, et ça marche dans les deux sens : demandez-leur quel est le ressenti par rapport aux trans. Cela vous permettra d’identifier très rapidement qui se préoccupe réellement d’égalité et qui est un vrai abruti.
#2 Les enfants qui meurent de faim
Et les femmes en Afghanistan, hein ?
BIM, se dit-il, je l’ai bien mouchée, cette greluche !
Ou pas.
Cet « argument » revient systématiquement et permet de manière bien commode de détourner l’attention du sujet principal.
Donc en résumant, seuls les « vrais opprimés » méritent qu’on porte leur voix. Genre les enfants qui meurent de faim là-bas-loin-en-Afrique (même si l’Afrique n’est pas un pays). Les autres sont des privilégiés en comparaison, et n’ont qu’à fermer leur gueule.
Bien sûr, les gens de loin-là-bas méritent qu’on porte leur voix. Au-delà du fait que ce type d’affirmation est une tactique bien mal déguisée de fermer le débat, plusieurs problèmes se posent, dont celui du relent néocolonialiste qui refoule bien du goulot quand même.
Bonus : Cette technique, d’autant plus si elle est construite à l’aide de liens et de photos, vous fera vous sentir coupable. Et à juste titre, car oui, c’est vrai, on n’en fait pas assez.
Parade : On n’en fait pas assez, mais les femmes afghanes sont grandes et ne nous ont pas attendu-e-s pour organiser leur lutte. S’informer et relayer c’est déjà participer. Organiser notre propre lutte peut aussi permettre à la pensée féministe de se propager, encourager les autres femmes, les motiver à se battre. Une victoire face au patriarcat c’est beaucoup d’émulation dans le monde !
Pour votre interlocuteur si préoccupé du sort des enfants qui meurent de faim, demandez-lui la copie de sa déclaration d’impôts où figurent ses nombreux dons aux associations. Demandez-lui comment IL agit, concrètement, si le problème le préoccupe tant.
#1 « Je ne suis pas féministe, je suis égalitariste »
Haaaaaaaaaaaaaa… mon préféré.
L’Égalitariste se pose en tant qu’entité supérieure au débat. Facile, car il ne s’y sent pas impliqué. Pratique, car il nie complètement le débat en question. Multifonction, car il permet de nier n’importe quelle oppression !
Parler d’égalitarisme dans une discussion féministe, c’est déjà jouer sur les mots (Les Combattants de la Sémantique utilisent souvent cette astuce rhétorique). Ce terme vient souvent, en réalité, du rejet du mot « féminisme ».
J’aime pas les mots en -isme.
Donc on s’engage, ouais, mais pas trop-trop, et puis on s’engage mais dans une optique « plus large ». Non, c’est vrai, les femmes ne sont QUE la moitié de l’humanité. Surtout, on s’engage dans un terme fourre-tout bien pratique qui permet de ne pas faire dans le détail et ainsi éviter de regarder de trop près les oppressions, c’est sale ces trucs là. On « élève le débat », les yeux humides et la truffe dressée vers les cieux impénétrables et leurs myriades d’étoiles.
En attendant, le débat, lui, n’a pas avancé d’un iota.
Bonus : L’Égalitariste se fait passer pour un Grand Seigneur de la Liberté Pourfendeur des Inégalités. Et ça (selon lui), ça pète la classe. Combo s’il se fait basher : les féministes n’aiment pas les égalitaristes, elles sont donc contre l’égalité, misandrie !
Parade : En toute logique, si quelqu’un est égalitariste, il est féministe. Bim.